Ce fut à
l’autre bout de la planète, dans l’un de ses replis épargnés de l'altération du
monde, que mes pas bien trop exaltés se sont un beau jour égarés. D’une
perpétuelle envie de courir, les pieds nourris par tant de beauté n’ont pu se
retenir. Guillerets, les orteils en fêtes, l’amusement fut tel qu’ils
s'enfoncèrent dans cette nature sauvage jusqu’à en omettre les conseils du
petit Poucet.
Ce fut
ainsi, à courir sans réfléchir dans une jungle austère qui leur était
totalement inconnue que mes pas s’en retrouvèrent perdu ; mais éperdument
résolu à découvrir ce qu'il pouvait y avoir de mieux au fin fond de cette inconnue.
Avec
sagesse, comme à son habitude lorsqu’il est à la merci de ses pas, le visage se
para d’un sourire audacieux. Le cerveau, quant à lui, se mit à faire de
l’esprit ; excentrique certes, mais avec philosophie : « Qu’importe
la destination pourvu que l’on ait l’ivresse », songea-t-il sans dosage de
son élucubration, au grand dam de Monsieur Musset, et de son flacon.
Soudain,
alors que le corps acceptait avec solennité de se vouer à cette inexorable
dérive, apparu à la croisée de l’un de ces mille chemins, cette petite
plantation de thé, perdue au milieu de rien.
Les yeux
n’en revinrent pas. Ils s’accrochèrent tour à tour aux merveilleuses couleurs
de ses champs, à la simplicité de ce petit village posé sur ses flancs, à ces
hommes et femmes ouvriers, à leurs enfants, tous le visage illuminé d’un
sourire à pleines dents.
Le cœur
bouillonnant, les pas se hâtèrent, enivrés par l'arôme du Camélia fraîchement coupé.
Au milieu de ces enfants, le corps s’abandonna en jeux, en rondes et en
farandoles. Les oreilles ne purent s’ouvrir aux moindres paroles, mais le coeur
comprit rapidement que tous ses yeux et sourires n’avaient jamais appris à
mentir. Devant la richesse de ces instants il fit alors le plein de joie de
vivre, de gestes simples et de sourires. Il s’en abreuva, comme un fou à la
pépie jusqu’à ce que les yeux n’en puissent plus et débordent de perles d’émoi.
Les mains se joignirent à d’autres et ce fut cette fois sur le bon chemin qu’à
la tombée de la nuit les pieds furent remis.
Le cœur se
dit alors qu’à certains moments, loin d’ici, au balcon des vanités, là où la
soif ne s’assouvit que de potions futiles, abjectes et mercantiles, il sera bon
de ressortir ces instants.
Il réalisa
qu’il ne suffisait que d’un pas, celui qui allait s’égarer, celui qui allait
emprunter cet autre chemin où les moutons n’osent s’aventurer, pour parfois découvrir
la vie telle qu’elle est et s'enrichir, d'un geste de la main, d'un sourire.
Gribouille
Des Mots dans la Sueur
Gribouille
Des Mots dans la Sueur
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire